Le club cévenol en déplacement ! Vendredi ler février 1901.
- Changement de
décor brusque, inattendu. La pluie bat les vitres, une pluie
méridionale, c'est-à-dire torrentielle, le vent fait rage, les platanes
éplorés secouent leurs branches dépouillées, et bientôt, pendant que
nous déjeunons, frileusement blottis autour de l'âtre, la neige, les
éclairs et le tonnerre se mettent de la partie.
Et
cependant il faut se mettre en route ; nous sommes attendus à
Lasalle.
Nous voici, Arnal et moi, dans la gare où tout ruisselle, et je ne sais
quel funeste pressentiment - d'ailleurs promptement justifié, on
va le
voir - me saisit, lorsque je vois, attelé au train du Vigan qui
doit
nous porter à Saint-Hippolyte-du-Fort, un wagon avec
l'inscription :
"Réservé aux ouvriers du service de la voie".
Il y a donc quelque
chose
sur la voie ! Inutile de chercher à nous renseigner ; en
pareille
occurrence, que l'on soit dans le Midi loquace ou dans le Nord peu
communicatif, c'est tout comme : une douce réserve est de rigueur
parmi
le personnel, qu'on a beau tourner, retourner, interroger ; mutisme
absolu sur toute la ligne !
Nous
partons à petite allure, mais enfin nous partons et l'espoir renaît
dans nos âmes apeurées. Dans la campagne nîmoise, ce n'est plus de la
pluie, c'est de la neige, de la belle et bonne neige authentique et
blanche ; elle couvre la terre, les collines de la Vaunage, et la
couche s'épaissit au fur et à mesure que nous avançons.
Tout va bien
pourtant jusqu'à Vic le-Fesq,
une minuscule station dont de ma vie je n'oublierai le nom.
Nous nous y
arrêtons comme aux gares précédentes, mais avec cette aggravation que
le train n'en repart pas...
Le
premier novembre 1882, le train parti de
Nîmes à2 h 22(14 h 22), lui, arrivait normalement devant l'abri de
quai
de la gare de
Vic-le-Fesq et s'y arrêtait à 4 heures 10 avec la ferme intention de ne s'y point attarder.
Cinq minutes, dix minutes, vingt
minutes se
passent, et Arnal se décide à aller interviewer le chef de gare,
paisiblement plongé dans ses paperasses, le dos à un feu flambant et le
ventre à son bureau, pendant que pestent et maugréent les voyageurs
dans les wagons aux bouillottes refroidies.
Avec la placidité
inhérente
aux fonctionnaires de tout grade, de tout âge et de toute latitude,
l'excellent homme veut bien nous informer que la rafale et la neige
ayant brisé deux douzaines de poteaux, jeté les fils à ras le sol et
suspendu les communications télégraphiques,
il est obligé de
retenir le
train jusqu'à plus ample informé, jusqu'à ce que le piéton dépêché à la
prochaine gare soit venu lui dire que la voie est libre, la voie
unique, et que nous pouvons continuer notre course peu échevelée, sans
crainte de nous jeter dans les bras mal accueillants d'un train venant
en sens inverse.
UTM: 31
T 586822 4858174 Combien
de temps cette situation va-t-elle durer ? On ne sait. Elle dure
si
longtemps qu'un moment nous entrevîmes la perspective de passer la nuit
dans le train, ce qui équivaut à y mourir de faim et de froid,
cependant que le brave chef de gare, gras et douillet, bien chauffé et
non moins bien nourri, noterait pour les transmettre à la Compagnie
dans un rapport officiel, nos souffrances, les transes et les spasmes
de notre agonie.
Quel document humain pour un
romancier naturaliste !
Il
était pourtant écrit que, cette fois du moins, le Président du Club
Cévenol ne terminerait pas ses jours en gare de Vic-le-Fesq ;
après
deux heures d'une attente fastidieuse et mortelle, alors que nous
commencions à nous résigner à notre triste sort,
le train
s'ébranla et
nous arrivâmes à Saint-Hippolyte-du-Fort sans autre encombre, mais à la
nuit noire.
vers l'ouest, afin d'éviter, plus loin, de buter contre le relief.
Nous parlions hier, écrivait le journal Le Gard, du 6 septembre 1921, à
cette place de l'organisation possible et même probable de divers
services d'autos-cars dans le département. Le principe même de ces
services doit être de relier par des communications rapides, toutes les
régions trop primitivement desservies par les transports vers le
chef-lieu, centre de l'Administration et des divers services, justice,
armée, cultes etc.
L'automobile confortable et
rapide doit améliorer singulièrement ces communications ; mais quelle
que soit l'ampleur qu'on pourra donner à un réseau routier, elle ne
sera jamais suffisante.
Il faut que les chemins de fer améliorent aussi leur circulation.
Deux lignes fort délaissées à ce point de vue, sont celles du Teil et du Vigan.
La ligne du Vigan,
rejoint à Tournemire la grande ligne Béziers Paris, mais pour parcourir
les quelque cent kilomètres qui séparent les points extrêmes de cette
ligne (Tournemire Nîmes) il ne faut pas moins de 10 heures, ce qui
représente une moyenne de 10 kilomètres à l'heure.
On conviendra que comme vitesse ça n'a rien de trop accéléré.
A petite vitesse, donc, le train
sautillait là un passage d'eau,
sur le dos d'un dalot soutenu par au moins une poutre métallique.
En suivant ses petits
cailloux, semés en d'autres temps,
la voie
déferrée ne se perd pas
et parvient
à la croisée
du "chemin du Moulin de
Montpezat à Crespian",
à l'angle de la maisonnette de garde-barrière du PN 25,
La
ligne de Gallargues au Vigan, complétéeen
1874par
les lignes de Nîmes au Vigan et
des Mazes-le-Crès au Mas-des-Gardies, aurait pu voir s'embrancher, dans
les parages, un chemin de ferde Nozières àSommières par
Saint-Mamert et Montpezat.
A propos du vœu
du Conseil général, en faveur d'une ligne de Nozières à Sommières, nous venons de lire dans un journal de la région un
article daté d'Alais et qui prétend prouver la convenance d'un chemin
de fer de Nozières à Sommières par St-Mamert et Montpezat.
Cette lecture porte à demander tout d'abord ce que vient faire Alais dans la question, puisque Alais jouit de la
ligne plus directe sur Sommières par Quissac et Vic.
Aller d'Alais à Sommières par Montpezat ! Quelle
idée ! Ce serait plus long et plus triste que le chemin de l'école... Et puis, si l'on étudie un
tantinet la carte géographique, ne voit-on pas que la ligne d'Uzès à Sommières, jetée sur Nozières, trouve son complément naturel par la vallée du Courme qui va doucement de Nozières à Vic ? Ce n'est
pas sans motif que le Conseil général a signalé notre
vallée ; c'est la voie la plus droite, la plus aisée, la
plus agréable et qui ne peut manquer d'être
préférée à la prétendue vallée de Montpezat. N'est-ce pas aussi un centre
de population considérable ? Depuis Brignon jusqu'à Lédignan et
depuis
Aigremont jusqu'à Cannes, combien ne voyez-vous pas de communes sur les
deux rives du
Courme ?
Parmi ces communes plusieurs possèdent de
vastes terrains dont elles feraient volontiers le sacrifice.
Autre considération : La construction de la ligne
de
Nozières à Vicportant sur un sol toujours à niveau, sans rivière ni colline, très ferme, à l'abri d'inondation et d'éboulement,
serait peu coûteuse et son entretien fort économique. La belle pierre de Lens, ce marbre du Gard, s'offrirait presque sur tout le parcours.
Un autre coup d'œil sur la carte montre aussi que la ligne dèjà exploitée d'Uzès à Nozières fuit la prétendue vallée de
Montpezat pour aller tout droit dans la vallée du Courme. Il faudrait ramener cette ligne sur elle-même,
en arrière, la tordre en quelque sorte pour
la replier vers Montpezat tandis qu'elle court naturellement vers Domessargues et Vic-le Fesq...
Le
premier novembre 1882, le train parti de
Nîmes à2 h 22 s'apprêtait ici, au
PK 712,30,
Projet de ligne de Nozières à
Sommières pat la vallée de la Courme (suite)
Qui ne sait d'ailleurs que le grand Central est assez encombré et
réclamerait plutôt des simplifications.
Or, en l'empruntant de Nozières àFons pour aller
chercher, sans les trouver, desvoyageurs àMontpezat, on ajouterait
encore à lacomplication des trains.
Qu'en pensent les chefs degare ?
Ah !si Saint-Mamert,
Montpezat, Souvignargues avaient demandé la ligne d'Uzès surFons quand on dirigea cette ligne sur
Nozières, et l'avaient obtenue ;la vallée du Courme n'auraiteu plus rien àespérer ; mais la
direction de la ligned'Uzès
sur Nozières, une fois adoptée, c'est la vallée de Saint-Mamert,
Montpezatqui
perdrait tout espoir. Les travaux déjàfaits imposent Vic comme objectif, c'est à-dire notre vallée qui n'a guère que 15kilomètres. Nous reviendrons sur cette question.
Bornons- nous pour le moment àremercier le
conseil général quine
veut pas, et àbon
droit, que lesvoyageurs
d'Uzèset
de Sommières soient condamnésplus longtemps àperdre une journée pour
franchir la petite distance qui sépare ces deuxvilles, et terminons enpriant nos
députéset
nos sénateurs d'aviser pourqu'il soit bientôt donné
suite au vœu deux fois exprimé par nos conseillers généraux. Il y va
de l'intérêt public et
aussi de l'intérêt
de la compagnie P.-L.-M.
voûté sur des eaux
intermittentes, que le "Nivellement Général de la France" attribue à un
ruisseau des Cabriers.
L'article du journal "Le Gard", au sujet de la ligne du Vigan et Tournemire, se poursuivait ainsi: Pourtant rarement une ligne n'eût à
desservir une aussi grande quantité de pays viticoles, agricoles et
industriels d'une remarquable richesse.
Prenez un indicateur vous lirez : Caveirac, Langlade, Calvisson,
Sommières, Salinelles, Quissac, Sauves, St-Hippolyte-du-Fort, Ganges,
Sumène, Le Vigan, Alzon etc. au total 22 gares desservant près de 100
localités et plus de 80000 habitants.
On reconnaîtra que tant d'intérêts méritent de n'être pas négligés.
Il est nécessaire que dès 1922 les lignes du Vigan
et du Teil soient dotés de trains accélérés, capables d'amener à Nîmes
en 2 heures au maximum les habitants des gares les plus reculées du
département.
Il ne faut pas que nous soyons, à notre époque, en retard sur les pataches d'autrefois.
Pour cela toutes les organisations
départementales et locales doivent agir activement auprès
de la Compagnie P.-L.-M.
Un éboulement s'est produit hier, sur
la ligne de Nîmes au Vigan
à l'endroit appelé la tranchée de la
terre rouge,
au point kilométrique 711,
une motte de terre et de maçonnerie,
pouvant être estimée à cent mètres cubes, s'est détachée soudainement
et a été précipitée sur les rails à l'instant précis où la machine
arrivait sur ce point.
Le choc a été si violent que la
machine, le tender, le fourgon et la première voiture de troisième
classe ont été refoulées contre la paroi opposée.
L'arrêt a été instantané.
Il n'y a pas eu d'accident de personnes.
Le mécanicien et le chauffeur
qui sont restés sur leur machine sans se rendre compte de ce qui
arrivait n'ont eu que de légères contusions.
Les voyageurs peu nombreux, d'ailleurs, à cette heure matinale, en ont
été quitte pour l'émotion et un stationnement prolongé.
La voie est obstruée. Les voyageurs
sont transbordés et les marchandises détournées.
La circulation ne pourra être rétablie que demain.
Le Journal du Midi du 16
février 1902 confirme la
prévision :
L'éboulement de Vic-le-Fesq.
- La circulation a été rétablie hier matin à dix heures sur la
ligne du
Vigan au point où s'est produit l'éboulement que nous avons relaté.
La nature confond ici, depuis plus de 150 ans, écoulement et éboulement.
Il y a quelques jours, en parcourant
un journal (ce qui m'arrive quelquefois) mes yeux tombèrent sur cette
annonce : QUISSAC grande
fête à l'occasion de la foire du 20 septembre ;
suivait un programme des plus alléchants.
Je
me souvins alors qu’un de mes collègues, à la rédaction du Furet
Nimois, avait tout récemment assisté à une fête de ce genre, qu'il en
avait même rédigé le compte-rendu et je résolus de faire de même.
Je
rassemblai mes souvenirs et finis par me rappeler que j'avais à Quissac
un copain du bon vieux temps, je rentrai donc chez moi en toute hâte,
fourrai quelques frusques dans une valise quelconque, sautai dans un
tramway et quelques instants après, la vapeur, cette magnifique
invention... etc., etc., me poussait ou plutôt m'entraînait dans la
direction de Quissac.
Je
vous ferai grâce de mes impressions de voyage, elles se ressemblent
toutes par le temps qui court : un voyageur de commerce fumant une
énorme bouffarde en lisant L'Intransigeant, une bonne vieille à
lunettes bourrant un affreux caniche de sucre et de biscuits, deux
salutistes causant à voix très basse, enfin votre serviteur parcourant
pour la centième fois le Colonel Ramollot, telle était la composition
du wagon.
Je fus tiré de ma
lecture par le cri de :Hors tous !qui
fut poussé à diverses reprises à la portière.
Je
crus à un danger quelconque et me disposais à descendre lorsque le
voyageur de commerce me fit obligeamment observer que nous étions
arrivés à une station appelée Orthoux.
Je
le remerciai et repris ma lecture en m'écriant : Drôle de nom tout de
même !
Mort
du croup dans un train.
Hier, l'après-midi, dans un train venant du Vigan à Montpellier, se trouvaientune mère et un
jeune bébé atteint de la terrible maladie appelée heureusement à
disparaître grâce au docteur Roux. La mère
amenait son bébé a Montpellier pour le faire opérer et le sauver. Son
espérance a malheureusement été déçue.Enroute, à la hauteur de la station
d'Orthoux,le pauvre bébé a eu une crise
suprême, et après une horrible et courte agonie est
mort étouffé.
Côté cour, la station était desservie
par un chemin - actuelle impasse de la
Cambuse - embranché à la route nationale N° 99.
Une chanson populaire a rimé les malheurs conjugaux d'un certain chef
de gare. Celui de la gare
d'Orthoux aurait été bien mieux inspiré de
s'en tenir à cette seule... particularité.
Déraillement.
- Le train partant du Vigan à 4 heures du matin et arrivant à
Nîmes à 8
heures, a déraillé hier deux fois pendant son trajet : la première
fois
à Orthoux la deuxième à
St-Césaire-les-Nîmes.Il a été promptement mis
sur les rails à Orthoux, mais dans la seconde gare les dégâts matériels étant plus
considérables, il a fallu beaucoup plus de temps.
Aussi a-t-on vu de
nombreux voyageurs se rendant au marché de Nîmes, parcourir à pied les
4 kilomètres qui séparent Saint-Césaire de notre ville.
Fort
heureusement, il n'y a pas eu d'accidents de personnes; ces deux
déraillements sont attribués au mauvais état de la machine.
Le Petit Journal du 6 septembre 1912 rapporte, lui, un choc de trains. Le train de voyageurs 3540, partant
de Nîmes à 6 h. 30, et se dirigeant sur Le Vigan, a tamponné, hier soir,
le train de marchandises 5925, venant en sens inverse, en gare d'Orthoux.
Au cours de cette collision, les machines ont été fortement
endommagées ; celle du train de voyageurs a déraillé, obstruant la
circulation sur la voie unique.
Cinq voyageurs ont été légèrement blessés. Les dégâts matériels sont
très importants. Cet accident serait dû à une erreur d'aiguillage.