Ce feuilleton relate le
tout premier voyage en
Afrique de l'auteur. Il n'a jamais fait l'objet de
publication mais illustre les paysages et certains lieux dont il
est question dans ses livres.
A quelque 600 km d'Alger, le M'Zab est un des
grands pôles
d'attraction touristique de l'Algérie. Dans une nature
hostile,
ce sont les constructions humaines qui laissent un souvenir
impérissable.
Au milieu d'un plateau stérile, tout de rocaille grise, des
ravins se sont creusés, striant la terre de tout un
réseau serré de lits d'oueds fossiles. Cette
région est traversée par l'oued M'Zab dont les
crues se
font attendre parfois dix ans. Entre-temps son lit sert de
chemin.
Ce principal oued a donné son nom
à la
région et à ses habitants les Mozabites.
Mais
qui sont ces Mozabites
installés depuis
neuf
siècles dans un lieu particulièrement aride,
où
rien a priori ne
semblait retenir l'homme, où l'eau profonde obligeait
à
de longs
travaux pour creuser un puits ?
Ils ont fait pousser dans ce
désert
isolé des palmeraies et ont bâti en l'espace de
quarante
années
plusieurs villes distantes de quelques kilomètres seulement
:
d'abord
El Ateuf, Mélika, Bou Noura, Béni Isguen et
Ghardaïa, qui forment une
splendide pentapole dans un périmètre restreint ;
puis,
plus tard et
plus loin, Berriane et Guerrara. Qui sont ces hommes qui ont si bien su
préserver leurs cités de toute influence
étrangère ?
Les Mozabites préservent jalousement
l'intégralité de leur communauté et la
tranquillité de leur vie privée et ce soucis
constant
transparaît dans l'architecture de leurs villes. Ceintes
d'un rempart,
celles-ci s'organisent,
suivant
un plan concentrique,
autour
de la
mosquée qui occupe une position élevée.
La
mosquée principale se distingue par
son minaret. Les rues sont étonnement calmes.
On perçoit tout juste le pas des femmes, drapées
du haïk blanc, qui ne laisse apparaître que leur
œil gauche.
Près
de l'entrée,
que nous franchissons, se tient le marché.
Ainsi les
étrangers
amenés par
les affaires ne viennent-ils pas souiller le coeur de la
cité.
Ces
jardins, où sous les palmiers
croissent des
grenadiers et des agrumes, sont également séjours
d'été. Derrière les murs qui bordent
chaque chemin
sont construites des maisons où les Mozabites viennent
passer la
saison chaude.
Contrairement aux maisons
"inviolables" des villes, les
étrangers peuvent parfois être accueillis
dans ces
résidences estivales.
Dans les palmeraies les mosquées n'ont pas de minarets.
Elles
sont basses et possèdent parfois des salles souterraines,
probablement pour ne pas être repérées
car elles ne
sont pas protégées comme celles des villes.
Les palmeraies portent la marque du travail des hommes qui ont
creusé des puits profonds, fait des réservoirs,
construits des barrages pour retenir l'eau des crues,
disposé toute une série
de Séguias pour alimenter les jardins, placé
des peignes
et des trémies.
Deux ans après
notre passage, Ghardaïa est classée site
touristique par l'UNESCO comme Patrimoine Mondiale et deux
années plus tard
devient Wilaya (Préfecture). Elle le mérite mais
nous n'y sommes pour
rien.
En ce mois de janvier, le caractère "touristique", dans le
sens
: envahi de touristes, ne nous saute pas aux yeux. Certes nous n'y
sommes pas seuls étrangers, mais les rares autres semblent
être, comme nous, "des randonneurs" au long cours.
Il faut d'ailleurs, pour mériter ce vocable, commencer
à
songer à reprendre la route. El Goléa, prochaine
oasis se
trouve 245 kilomètres au sud.
Nous décidons de poursuivre jusque là. Finalement
le grand sud nous attire autant qu'il nous effraie.
Comment allons-nous réagir face aux immensités
désertiques ?
Vous le saurez, peut-être... en suivant l'épisode
suivant :