"Séparé
de la
gendarmerie par une ruelle surensablée, accoté
aux pans
de mur en pisé d'une maison en ruine, un bâtiment
ocre
m'apparut, écrasé de soleil. C'était
une
construction maure, dorée. Mordorée.
"L'auberge aux pans d'or".
Voilà planté le décors de ce
récit par
Jacques Mancip avec cette verve colorée qu'on lui
connaît.
"L'auberge se trouve d'ailleurs implanté dans un local
affecté à la brigade de gendarmerie. Elle n'a
aucune
existence légale. C'est le joujou du chef : l'auberge au
pandore."
... Et voilà du même coup justifié le
titre de l'ouvrage, dans un raccourci dont l'auteur a le secret.
Comment
Jacques Mancip, un
Français bloqué par la mécanique dans
un profond
trou perdu dans les sables à la frontière
nigéro-algérienne a-t-il pu devenir "patron"
d'une
auberge fantôme et même traverser nuitamment le
désert au volant d'une Land-Rover de la gendarmerie
algérienne ? Parviendra-t-il, au demeurant, à
sortir de
cet autre "trou perdu" qu'est le village touareg d'In Guezzam
où
il a été "tracté" par miracle ?
Il est des livres qui ne se racontent pas mais
qui
"délivrent". L'Auberge
aux pans d'or est de ceux-là, à la
fois hilarant, surprenant, cocasse et enlevé à un
train d'enfer.
L'humour
au second
degré qui a émaillé les deux premiers
tomes de la
collection "La piste trafricaine" s'épanouit dans cette
dernière partie de la trilogie de Jacques Mancip comme un
feu
d'artifice de rythme et de vision pénétrante.
Tout est si
riche dans cette aventure (ou malaventure) que le récit
étrangement véridique peut tout à fait
se lire
indépendamment des deux précédents.
De
nouveaux personnages surviennent incroyablement naturels dans le
décors surréaliste d'un sable obsédant.
C'est plus encore dans l'écriture que dans la
réalité irréelle de cette errance
folle à
travers le désert que réside la
maîtrise de l'auteur.
Qui oubliera la description saisissante de cette partie
d'échecs
sur les dunes qui prendra sans doute rang aux
côtés des
grands morceaux d'anthologie en se démarquant par la
succession
de ses époustouflants travelings ?