Toutefois
il n'est pas sûr que mon expérience naissante
suffise à elle seule à nous faire
éviter la
dernière difficulté importante
précédant la frontière.
Heureusement pour nous, un signal "danger" apparaît au loin.
Les deux camping-cars français
sont arrêtés et bloquent le passage à
éviter.
On
a affaire là,
à une très longue ornière,
infranchissable par des
véhicules avares de garde au sol. On peut, certes, avec
beaucoup
d'élan, se "glisser" dans la passe sur 100 ou
200 mètres, mais le véhicule finit toujours par
remarquer que, roues en l'air, il avance moins bien.
Nous avons
évité
le piège en suivant des traces parallèles
jusqu'à
un espace caillouteux propice au stationnement volontaire.
Nos compatriotes, dans leur
malheur ont de la chance. Un
vieux Berliet surchargé de marchandises et de passagers
passe
par là.
Même avec notre aide, sans
cette abondante main
d'oeuvre tombée de la benne en même temps que du
ciel, le vieux
Renault risquait de meubler ce coin de désert.
Les manoeuvres de
désensablement surchauffent les moteurs
au-delà du seuil de la cuisson des bielles. La
température
ambiante accentue le processus. L'épave
masquée par le camping-car fait office de panneau "danger".
L'habitué
reconnaît, en fond, les dunes qui entourent In Guezzam. Ce
n'est pas encore
mon cas.
Nous ne serons
rassurés qu'en voyant les installations
frontalières.
D'In
Guezzam, je ne dispose d'aucune diapositive.
Nous n'avons pas trouvé judicieux de nous faire prendre,
l'appareil photos à la main, devant des installations
militaires.
Et ici, qu'est-ce qui n'est pas militaire ou assimilé ?
Lorsque l'année suivante, je resterai bloqué,
trois mois
- de la mi-juin à la mi-septembre - je ne disposerai pas du
matériel nécessaire à immortaliser les
lieux.
Je
détiens toutefois deux photos faites par d'aimables
voyageurs de passage.
Ici,
devant la brigade de
gendarmerie, qui n'a rien à voir avec la police des
frontières. Les
prérogatives des deux corps semblent être les
mêmes qu'en France.
Sur
chacun de ces
clichés
apparaît un ou plusieurs poteaux électriques.
Comme
partout ils supportent des fils du même nom. Leur
originalité ne se voit pas. Ces câbles ne
transportent
rien.
Faute de
filtres changés en temps et en heure, le
générateur a
subit les outrages du sable et attend réparation. Pour
pallier,
il a été fourni au chef de poste (In Guezzam
n'est encore
qu'un poste avancé), un petit
générateur.
L'appareil capricieux, sujet à
d'imprévisibles
sautes d'humeur, dispense à la nuit tombante, le courant
nécessaire à
l'utilisation du poste-émetteur de la gendarmerie et par
extension de fil à l'unique ampoule du "fantomatique
restaurant".
Par
extension
de l'extension, le gargotier parvient parfois à
alimenter
une seconde lampe. Des épissures pirates,
camouflées dans
le sable, détournent encore quelques watts au profit d'une
dizaine d'autochtones, riverains du fil d'alimentation.
Je
comprendrai 25 ans plus tard
pourquoi la température concourait
l'été à
des records mondiaux. In Guezzam culmine à... 411
mètres
d'altitude.
Ne
rêvons plus !
Revenons à notre expédition. Aujourd'hui, point d'Auberge
aux pans d'or, point de gargotier, point de
résultat de
coupe du monde inscrit au mur : le match n'aura lieu que
l'année suivante...
Tout près de la
gendarmerie, la station-service dispose de son propre groupe
électrogène. Souvent il chôme, faute de
carburant. Dans le cas contraire, comme
aujourd'hui pour nous, il faut encore trouver quelqu'un pour
prêter une batterie afin de le mettre en
marche. L'accumulateur de
la Renault 6 ne délivre pas la puissance suffisante
à cette mission. Comme la distribution ne se fait pas
à
la demande mais à heure déterminée,
nous ne sommes
pas seuls.
Les
formalités de sortie du territoire exigent encore de braver
"la grand' rue" ensablée.
Lors de ce premier voyage, nous sommes parfaitement en
règle.
Même trop. Cela n'est pas gage de franchissement plus
aisé
des frontières. Parfois cela peut même
être
jugé louche.
Ce n'est pas le cas "présentement". Le cachet de la police
nous
donne droit d'aller voir la douane qui nous permet d'aller
nous jeter dans un no man's land de 25 kilomètres.
Bien
que répandus hors frontières, les sables sont
toujours
algériens et moins bien disposés que les
fonctionnaires à nous laisser
quitter le territoire.
D'autres,
9 ans avant nous, ont rencontré les mêmes soucis
pour monter au fort d'Assamaka, premier contact avec le Niger.
L'après-midi entière suffit à peine
à
effectuer la transition, sans transition vers l'Afrique Noire.
Photo François Guignard, extraite du site :
http://www.surlespistes.fr,
avec l'aimable autorisation de l'auteur. (Cf Liens).
L'année
suivante,
j'irai plus vite mais moins loin. En sens contraire, alors que je
remontais du
Niger vers l'Algérie, je casserai le pont arrière
de ma
504 dans ce no man's land. Dans un trou. Un trou perdu... heureusement,
côté
algérien. C'est "Le Pont des Soupirs".
photo Jean Soupene
J'ai
traversé 11 fois ce no man's land, je n'ai croisé
qu'une fois la borne frontière. Aujourd'hui.
Le
même endroit en 1962,
19 ans auparavant. La borne séparait alors
l'Algérie de
l'Afrique Occidentale Française
Photo extraite du site de Jean Soupene http://pagesperso-orange.fr/messaoud/talak.htm,
avec l'aimable autorisation de l'auteur. (Cf Liens)
En
1981, le fort militaire d'Assamaka n'est
fréquenté que par des hommes en treillis dont le
mot de bienvenue de l'un d'entre eux est :
- Je vous dresse une contravention.
Une amabilité pour le moins surprenante.
Photo extraite du site :
http://www.surlespistes.fr,
avec l'aimable autorisation de l'auteur. (Cf Liens).