Ce n'est pas l'absence de début d'été
qui me fait
fuir l'arrière pays languedocien pour l'Andalousie.
Il y a une trentaine
d'années, j'avais cru accomplir un
exploit
en "montant" ma voiture à la Sierra Nevada sur la plus haute
route
d'Europe (ou pas !).
Un
moteur diesel lui avait permis d'accéder au Pico Veleta au
grand étonnement d'automobilistes suffoqués de
voir leurs propres
véhicules manquer de
souffle à l'approche des 3000
mètres d'altitude.
L'idée
de refaire cette ascension à la seule propulsion des mollets
m'effleure
de temps à autre. Jusqu'à ce jour, je n'ai pas
répondu à cette
sollicitation par crainte de réveiller en moi un
goût immodéré du
nomadisme.
Ce n'est pas une forme
exceptionnelle qui me pousse
à mettre mon projet
à exécution
fin juin 2007
mais plutôt une conjonction de diverses conditions pratiques
: une température conforme
à mes
goûts et nécessités, des jours au
meilleur
d'eux-mêmes, une période hors saison, hors
touristes.
C'est ainsi que ce 2 juillet 2007 je me trouve dans un village de la
périphérie de Grenade.
Je n'ai pas prévu
d'attaquer
la
Sierra Nevada par la route principale truffée de
caméras, desservie par
une autovia et un
tunnel interdit aux vélos.
Je pars de Monachil
par une
petite route de montagne empruntée
régulièrement
par les cyclistes amateurs et occasionnellement par les professionnels
de "La Vuelta".
La petite route accueillante est aussi exigeante, même pour
les
confortables développements d'un VTT. Devant moi, une
camionnette de touristes doit faire demi-tour, trahie par son moteur
poussif.
Partie à 800 mètres
d'altitude, la route amorce les deux premiers kilomètres de
sa grimpée
vers le camping Rutadel Purche sur des pourcentages
à 12%.
Le cycliste a le temps
d'admirer au passage une maison troglodyte, pendant que la
pente enchaîne des 13, 11, 13, 11 et 12%
jusqu'au kilomètre 6.
Une
déclivité de 15, 14
et 13% permet enfin d'atteindre un
col
géographique traversé par divers
itinéraires décrits sur un plan.
Un kilomètre plus loin,
le camping
Ruta del Purche offre une solution
d'hébergement
intéressante à
l'abri de l'affluence et de la canicule grenadines.
Pour
exécuter l'ascension
complète du Pico Veleta, le cycliste devra certes descendre
à Monachil
pour se trouver au pied du mur au petit matin de son exploit !
Rien n'empêche
de
découper l'effort en deux ! Le plaisir n'en sera pas moindre
!
UTM
: 30 S 456308 4110340
Le considérable élan pris
dans la descente
amorcée au-delà du restaurant Purche
se perd dans les 13% de la montée qui
lui fait
face.
Peu avant le premier col de la
randonnée, un chemin
à main
droite plonge vers le barranco de las Mimbres avant de remonter vers un
enchaînement de cols... à visiter
absolument.
Un ex-taureau "Osborne", débaptisé par les lois
de protection
anti-alcoolique, partage cet anonymat sur la pente du Cerro del Chaparal.
La route
serpente à flanc du Cerro de las Grajas
où elle franchit ses kilomètres
20
et
21 avant de
longer
le restaurant "des Vipères".
En 2007, sans carte précise, sans GPS,
j'ai
"franchi", je ne sais où, un Collado de Las Viboras*,
donné proche.
Depuis,
à chacun de mes passages dans le secteur, je remets
à des lendemains
incertains un franchissement plus scrupuleux de la passe.
Le 12 juillet 2013, bien que le GPS du VTT ne
dispose d'aucun
autre waypoint que celui du col lui-même, je me trouve pris
du désir
d'imprégner ma mémoire d'une image
certifiée de ce Collado de las
Viboras.
Au doigt mouillé et à la flèche de la
boussole du GPS, escorté par deux chiens,
j'emprunte à cet effet un CV
desservant quelques habitations éparses.
L'escorte des canidés
était un piège qui avait pour but de me livrer au
reste d'une meute de
chiens
braillards dont les plus petits ne
sont pas les moins hargneux.
Le soucis de quitter
au plus vite
le hameau,
m'incite à forcer l'allure sur la chaussée
revêtue
et à m'engager précipitamment dans un
dédale
de chemins
et sentiers de natures
diverses
qui
s'égaient
dans la montagne sans me rapprocher de mon objectif.
C'est finalement près du hameau aux chiens
que je dois redescendre prendre le départ d'une sente
à la route
du Pico Veleta.
C'est
évidemment par là, que pour un simple
aller-retour, au passage, un
chasseur de col organisé se rendra au Collado de las Viboras.
expose aux automobilistes la vue
panoramique qu'ils n'ont pu
apprécier quelques virages plus bas faute d'emplacement de
stationnement.
02-JUIL-07 16:40:56
L'endroit offre à tous une vue élargie sur le Collado de
las Sabinillas
(2025 m) et son environnement .
Le prochain kilomètre
amène l'ancienne route à surplomber
la nouvelle
sur fond de Sierra Nevada...
enneigée.
L'ascension aisée, par temps calme,
franchit le septième
kilomètre
de la A-4025
et se prépare à retrouver
la A-395 qui a desservi
au passage la station de ski "Sol y Nieve".
La jonction s'opère à
hauteur du Collado
de
las Sabinas
mis à l'abri d'un rail de sécurité.
02-JUIL-07
09:48:26
Ce col
comme le précédent est bon à
prendre, pour qui en fait collection.
lorsqu'on porte le regard loin des zones
où elle
est agressée.
Le trente-sixième kilomètre
12-JUIL-13 10:24:28
précède le nouveau
panneau
11-JUIL-11 14:52:12
directionnel de la
station de ski "Solynieve", étendue à
l'urbanización de Pradollano par
un surplus de
béton.
En 2013, sur le terre-plein jouxtant
l'embranchement, un énorme et bruyant
générateur
recharge les batteries de voiturettes
électriques ! Au nom de l'écologie, probablement !
Les années suivantes je ne peux manquer de prêter
attention à l'aire
asphaltée qui s'étend
12-JUIL-13 10:50:29
des deux côtés de la route.
En 2013, l'endroit accueille une multitude de véhicules
légers, mais
aussi des grosses cylindrées de même
marque, en essai de moteur ou de pneus, et d'immenses autobus
à
soufflet
qui semble aussi procéder à quelque
épreuve de fiabilité.
Au-delà du parking, la route devient
interdite
à la
circulation...
non autorisée par
un homme qui, en 2007, lève ou abaisse une
barrière à l'approche de chaque arrivant.
En 2010, sans dérogation, la crise est
passée par là. Depuis, le gardien limite ses
efforts et les cyclistes,
devenus
nombreux, en sont quitte pour contourner l'obstacle.
En 2011, le vent violent depuis le départ,
déséquilibrant depuis le
Collado de las Sabinas,
s'oppose à ma poussive poussée du VTT
au-delà des 2560 mètres.
A cette altitude, une bourrasque parvient à soulever ma
pesante monture
à hauteur de ma tête, me faisant renoncer au
Collado de las Yeguas, but
de mon déplacement.
En 2007, à
2657 mètres,
le temps de constater mon erreur, j'ai usé quelques forces
sur la route
de la station
radio-astronomique.
Cette fois, en 2013, c'est sciemment que je bifurque à droite
Le 2 juillet 2007, lors de ma première montée en
VTT,
la route s'éloignait plus radicalement
de la
station
de ski Sol y Nieve.
Ce jour là je tutoyais enfin les sommets dans un paysage
encore
préservé, ce qui ne sera plus le cas 4 ans plus
tard.
En 2007, donc, je ne rencontre que deux
randonneurs
espagnols qui ne savent pas si je trouverai de l'eau plus haut.
Eux-même n'en n'ont pas trouvé et ont du boire de
la neige.
Comment ont-ils pu ?
Les amas restants sont recouverts
de pollutions diverses.
L'altitude 2750
est passée. La soif est intense.
Je
constate qu'en grattant, de la belle neige blanche et compacte
apparaît. J'en remplis mon bidon.
Tout à droite le Pico
Veleta... qui ne figure pas à mon programme.
Mes forces sont
en priorité au
service de la conquête des cols.
Au milieu, le Mulhacén.
Je devrais m'en approcher.
On peut mesurer les efforts déjà accomplis
plus encourageants
que ceux restants.
Même fermée à la circulation ordinaire,
la route du Pico Veleta nécessite un minimum d'entretien.
Certains passages ont perdu leur goudron
mais restent encore cyclables.
A force de monter, j'ai
maintenant passé les
3000 mètres
et je devrais
photo 2010
bientôt trouver un embranchement à main droite.
La route du Pico Veleta
continue
sur la gauche sous un amas de neige. J'emprunte
le chemin en face qui atteint en
quelques centaines de mètres le Collado de
Veleta ou Carihuela
del Veleta.
UTM
: 30
S 466999 4101001
Quelques pelletées de
goudron suffiraient à en faire le plus haut col routier
d'Europe.
Surtout pas !...
* Photo 2010 (Non je n'ai pas bu la congère)
... on y construirait un rond-point !
Cette économie faite, il reste le plus haut col accessible
100%
en vélo.
Le Collado
de Veleta est
entravé d'une barrière
UTM
: 30 S 466979
4100420
gardée par des
bouquetins.
Premier août 2010, la même barrière...
gardée par la neige.
Le refuge du Collado de
Veleta
domine le passage.
Refugio Vivac
En 2010, ce lieu désert est investi par des dizaines de
randonneurs. Du fait de la congère, il est devenu le lieu de
contournement incontournable.
Le Collado
del Lobo,
situé 79 mètres plus bas, comme sur ma carte,
paraît à deux pas... de loup.
A y regarder de plus
près, il faut d'abord descendre à la Laguna de
Aguas Verdes avant de remonter au col.
La barrière avait ses
raisons que même l'absence de circulation
autorisée justifiait,
d'autant que la
réserve de rochers n'est pas loin... au-dessus.
La remontée finit par
payer. Le col est proche. Je n'oublie toutefois pas que le chemin
inverse m'attend.
Plus je m'approche plus je me demande si cette "fenêtre" est
bien le Collado del Lobo
(3160 mètres).
Plus loin une "porte", que deux
randonneurs paraissent franchir, porte
toutes les caractéristiques d'un col.
En franchissant la fenêtre et la porte, je suis sûr
d'atteindre mon objectif. Voire plus ?
* 14 août 2009, je découvre une carte qui nomme le
col "La
Puerta".
Le Collado
del Ciervo, près du
Mulhacén
me
paraît encore bien lointain. Il
n'est pas donné sur le chemin... qu'il
est
théoriquement interdit de quitter. Ma
carte situe la passe au-dessus du refuge de la Caldera... que
je ne distingue
même pas.
Si je remonte un jour, ce sera d'abord pour voir si j'ai franchi ou pas
un Portillo
de los Crestones de Río Seco résidant
dans le secteur.
aux éboulis, au Collado
de Veleta, au carrefour avec la route et à sa
congère.
Bizarrement je suis remonté sans peine. La neige de la
Sierra
Nevada traite-elle les estomacs récalcitrants ?
J'ai
retrouvé
l'essentiel de mes forces ordinaires. Je ne transpire plus anormalement
à
l'effort.
Pourquoi dans ces conditions ne pas finir
de gravir le Pico
Veleta ?
Ce n'était pas
l'objectif,
mais l'occasion
est si belle.
Le revêtement perd peu à peu
son caractère routier. Une congère
s'opposerait à la montée d'un véhicule
même muni d'une
autorisation.
La piste remplace pour de bon les restes de route.
Ce n'était pas
l'objectif mais le panorama ne fait pas regretter le détour.
Photo 2010
En revanche, la dernière montée avant le Pic,
fait regretter, à
certains, les forces inutilement gaspillées plus bas.
Ce n'était pas
l'objectif,
mais
il
est
réalisé.
Pratiquement en solitaire, en 2007 ;
au milieu d'une
foule indisciplinée, en 2010.
En 2010, une installation liée au sports d'hiver semble
s'être hissée près du sommet.
Tardera-t-on à
croiser par douzaines, des vététistes tout
pimpants, en
provenance de cet investissement à amortir ?