dite de Charpal".
"L'embranchement de Charpal, d'une quinzaine de kilomètres
de longueur,
se détache de la ligne
de Marvejols
à la Bastide. Il est construit sur
un plateau situé à une altitude allant de
1 200 mètres à
1 400 mètres.
Le
tracé comporte un certain nombre de tranchées, assez
longues, dont
la
profondeur varie de 2 mètres à 8m50,
qu'il a été nécessaire de
protéger contre
les accumulations de neige provoquées par le vent du nord. Ce
n'est pas par suite de sa chute que la neige risque d'encombrer la voie
; un chasse-neige a vite fait de déblayer cette neige de
pleine chute.
Mais dans ces régions élevées, le vent
soulève les flocons
de
neige, les transporte au loin et les abandonne
derrière les endroits abrités, où son
action ne se fait plus sentir. La
neige accumulée en abondance vers ces abris, forme ce que
l'on
appelle, dans le Massif central, des "congères". Les
tranchées en déblai sont
particulièrement favorables à la formation de
ces dépôts. Le vent qui alimente les
congères ne
soulève pas la neige à une grande hauteur. Elle glisse sur le sol ou sur la
neige de
pleine chute, en une nappe de 0m50 d'épaisseur
moyenne, pouvant atteindre
exceptionnellement 2 mètres par un vent
très violent.
Cette
particularité a permis de trouver divers dispositifs
permettant d'empêcher l'encombrement
des tranchées,
non
pas en
supprimant la congère, mais en la
déplaçant et en la situant de façon
que son pied vienne mourir près du rail, sans encombrer la
voie.
Les pare-neige en bois,
jusqu'ici employés, ne
donnant pas satisfaction à
plusieurs points de vue, M. Merle a eu recours à des pare-neige en
béton armé composés
d'éléments
séparés.
Une préoccupation a
été d'obtenir
avec des éléments préparés
d'avance, des assemblages simples et
pratiques.
La fabrication organisée en série a
été faite sur un
chantier situé à l'origine de la ligne ;
les stocks constitués au
printemps ont été mis en place
l'été, pendant que la fabrication
continuait.
au lieu dit La Peyrière, où peut-être
il a existé une barrière non
gardée.
A ce stade, on peut
se demander ce que vient faire, à cette
altitude,
une
ligne de chemin de fer orientée vers nulle part, dans un
environnement
hostile.
Il a été écrit de nombreuses
contre-vérités et approximations au sujet
de cette ligne de chemin de fer en raison peut-être de la
faible
publicité dont elle a joui, n'étant pas ouverte
aux voyageurs.
"Le Président
de la République française,
Vu le rapport du ministre de la guerre et des pensions ;
Vu... Décrète :
Art. 1er. - Sont
autorisés et déclarés
d'utilité publique,
en vue de l'établissement d'un parc de stockage sous l'eau
des poudres
et explosifs de guerre, dit Charpal, sis dans les
dépendances de la
poudrerie nationale de Toulouse avec embranchement de voie
ferrée et
logements pour le personnel :
Les travaux à exécuter suivant les dispositions
du projet ci-dessus
visé ;
L'occupation temporaire et, s'il y a lieu, l'expropriation pour le
service militaire, de diverses parcelles de terrain non
bâties situées
sur le territoire des communes d'Allenc-Llaubert, Pelouse, du Borne,
Rieutort-de-Randon et Arzenc-de-Randon (Lozère).Lesdites
parcelles figurées par
trois teintes, jaune, violette et rose sur sept plans parcellaires,
documents dressés par le directeur de la poudrerie nationale
de
Toulouse et annexées. Ces travaux seront
exécutés comme travaux
militaires pour le compte du
ministre de la guerre et des pensions (direction
des poudreries). Art. 2. - Sont
déclarées d'urgence la prise de
possession par l'État
des parcelles de terrain dont il s'agit et l'exécution des
travaux,
étant observé que les parcelles appartenant
à la commune de Laubert
figurant au cadastre de ladite commune, sous le
n° 267 de la
section A pour la totalité,
sont
soumises au code forestier.
Art. 3. -
Le ministre
de la guerre et des
pensions est
autorisé à emmagasiner les
eaux
de la
Coulagne, sous la réserve que
pendant les périodes de
remplissage, il
devra s'écouler à l'aval du barrage un
débit continu, savoir de
100 litres par seconde du 1er mars
au 30 juin
et du 16 août au 15 octobre et
50 litres par seconde
du 1er janvier au
28 février, du 1er juillet
au 15 août et du 16 octobre au
31 décembre.
Toutefois,
les débits susvisés pourront être
réduits après accord entre
le ministre
de
la
guerre et des
pensions et le ministre de
l'agriculture si la nécessité de
diminuer la
durée de remplissage
du réservoir
était reconnue.
Art. 4. -
Un arrêté
préfectoral, pris sur les propositions des
ingénieurs du service
hydraulique, fixera les conditions de l'établissement et de
l'exploitation du barrage-réservoir. Art. 5. -
L'administration de la guerre [service des poudres] sera tenu
d'indemniser les irrigants et autres usagers de tous dommages qu'ils
pourront prouver leur avoir été causés
par les modifications que
l'établissement et l'exploitation du
barrage-réservoir apporteront au
régime de la Coulagne. Art. 6. -
Le
ministre
de la guerre et des pensions est chargé de
l'exécution du présent
décret."
La voie
déferrée atteint les
1231 mètres
d'altitude
où elle quitte la
commune d'Allenc et s'enfonce dans un
bosquet, sis sur la commune de Laubert.
A l'époque ferroviaire des lieux, le passage à
niveau de la route s'effectuait à l'arrière du
petit bois.
Sur les photos
aériennes
de 1943, soit cinq
ans après le déferrement de la ligne, on
distingue encore une probable bâtisse
(ellipse bleue).
Appartenait-elle au chemin de fer ? Rien ne permet pour l'heure de
l'affirmer.
La plate-forme ferroviaire abandonnée se perd ensuite entre deux champs
puis au centre
d'une même terre
comprenait
4 maisons
de gardiens dont cette maisonnette
aujourd'hui
en ruine.
1938
Etant donné que la voie ferrée allant de l'Arzalier à Charpal est inutilisée, que le passage à niveau sis sur la route nationale
au
lieu dit La Pierre Plantée, ne sert par conséquent absolument à rien,
mais qu'il provoque au contraire un encombrement des neiges au moment
des chutes abondantes,
qu'il occasionne ainsi une gêne sérieuse pour la circulation quand ce
n'est pas un arrêt total, les Conseillers Généraux soussignés émettent
le vœu que les barrières constituant ce passage à niveau soient
enlevées le plus tôt possible.
la
voie
déferrée poursuit sous forme de
chemin panneauté "non carrossable".
On
sait qu'en 1923
l'établissement d'un parc de stockage sous l'eau des poudres
et explosifs de guerre, dit Charpal, ainsi qu'un embranchement
ferroviaire avait été
décrétés
d'intérêt public.
On apprend des archives du Sénat qu'en 1928 : "Deux
barrages-réservoirs pour l'immersion des stocks de poudre
appartenant à
la guerre sont actuellement en
construction, l'un à Charpal dans la
Lozère,
l'autre au Chambon sur
la Romanche."
Un rapport "de l'ingénieur en chef
au Conseil général de Lozère" nous
éclaire sur la nature des
"3 groupes
de maisons". Ils sont affectés au personnel de gardiennage.
La surveillance des travaux revient au service de la Poudrerie
Nationale de Toulouse. L'exécution des travaux a
été adjugée à la
"Société Générale
d'Entreprise", 56 rue du faubourg St-Honoré,
à
Paris.
En
1927, les travaux de chemin de fer, commencés
en 1922, sont
terminés ainsi que les trois groupes de maisons.
Pourtant
durant la
campagne 1926, ces travaux n'ont pas été
poursuivis, la Société
Générale d'Entreprise ayant demandé la
résiliation de son marché.
Mais un arrangement amiable est intervenu et la S.G.E. a repris la
construction du barrage au printemps de cette année.
D'aucuns
ont pu
penser que la construction du lac de Charpal avait eu pour but de
cacher sous l'eau des munitions en prévision de futurs
conflits. Le meilleur endroit pour cela n'aurait assurément
pas été le domaine de
Charpal, situé au milieu de nulle part. L'embranchement
militaire et
les voies ferrées de montagne à voie unique
n'auraient pu supporter un
tel trafic. Leur vulnérabilité au climat se
serait ajoutée à celle
découlant d'un état de guerre.
L'humidité ne fait pas, non plus, bon ménage avec
la poudre.
Il s'agissait en fait de se débarrasser des munitions non
explosées de
la guerre 14/18. En 1918, la France s'est retrouvée
avec un énorme
stock de munitions résiduelles. Il y avait les munitions
françaises
mais aussi celles de nos alliés anglais et
américains qu'ils ne
voulaient
pas rembarquer en raison - entre autre - de leur
dangerosité.
A cela il faut
ajouter les stocks que les allemands n'ont pas pu évacuer
lors de la
reprise de
la guerre
de mouvement dans les dernières semaines du conflit.
Devant l'immensité
des stocks de munitions à déconditionner,
neutraliser ou retraiter,
l'armée française s'est retrouvée
devant un problème insoluble qu'elle
a
voulu noyer.
Traiter ces munitions aurait eu un coût insupportable dans le
contexte
d'après-guerre. Certaines munitions retrouvées en
mauvais état étaient
difficiles à identifier et par voie de
conséquence à désarmer.
Les obus chimiques ou à gaz
n'avaient pas été conçus pour
être neutralisés. Les obus explosifs à
ciment poudre avaient été stabilisés
dans une résine spéciale qui les
durcissait mais aussi qui empêchait ensuite de les vider.
La solution de rassembler toutes ces munitions en surface pour les y
stocker aurait demandé des moyens que la France de
l'époque n'avait pas.
Il aurait fallu ensuite en assurer un gardiennage sans fin.
Les risques qu'auraient fait courir ce stockage n'étaient
pas
acceptable
dans un pays qui pourtant n'avait pas encore inventé le
principe de
précaution...
appliqué de nos jours !
Il reste peu de
trace ferroviaire sur les chemins qui ont pris place sur la plate-forme
déferrée. Ici ou là, un oeil
avisé ou un pneu fragile peut rencontrer
quelque tire-fond
nomade
La
France de
l'après-guerre 14/18 n'avait pas non plus les
moyens de procéder à
un
enfouissement profond des munitions inemployées ou
abandonnées par
l'ennemi.
Recourir à de vieilles mines - encore eût-il fallu
pouvoir s'en passer
en ces temps difficiles - aurait consisté
à
entreposer des
engins dangereux dans des lieux qui le sont déjà.
C'est
ainsi qu'a
germé l'idée d'immerger ces munitions dans deux
plans d'eau.
A l'époque le territoire n'était pas pourvu de
lacs adaptés,
suffisamment isolés, pour recevoir l'encombrant stock.
Le ministère de la guerre eut alors l'idée de
ressortir des
cartons un projet hydraulique au domaine de Charpal en
Lozère.
Il
proposa
conjointement 10 millions de francs à la Société Civile des
Intérêts Collectifs de la Romanche
si celle-ci consentait à rendre possible une vidange de la
retenue du
Chambon en construction sur la Romanche.
Le 25 juin 1929, le Sénat fit
état des sommes engagées cette
année-là à ces fins.
Les eaux du ravin de
L'Ours (ruisseau de l'ourse)
s'écoulent beaucoup plus
profondément que les eaux de surface.
En
raison du
décalage entre l'urgence du traitement des munitions et les
lenteurs
administratives, c'est une solution de fortune qui est
adoptée.
Les munitions subiront un enfouissement léger de surface, au
cas par
cas, là où elles se trouvent, sans
réelle
traçabilité.
Depuis, certaines enceintes militaires qui accueillaient ces rebuts
sont revenues au domaine civil.
On considère que les deux-tiers de ces munitions ont
aujourd'hui
"disparu".
La
voie négocie deux
courbes
importantes
d'intérêt directionnel contradictoire.
Les procédures d'expropriation
des terres ont dû s'avérer complexes compte tenu
du nombre important de
parcelles cadastrales traversées.
Là-même, le
14 février 1927, des wagons
étaient pris dans la neige près
d'une grue
hydraulique destinée à l'approvisonnement en eau
des locomotives. La
maison
de gardien
Les photos d'époque
semblent indiquer que les wagons s'approchaient très
près du barrage en
construction.
La ligne a probablement eu des terminus évolutifs en
fonction de
l'avancement des travaux.
Une
partie des crédits inscrits aux chapitres 23 et 24 vise les
divers
travaux relatifs au magasinage et à la conservation des
poudres et
explosifs.
La majeure partie des stocks de
poudres, cotons-poudres et explosifs de diverse nature
restés au compte
du Service des poudres au moment de la démobilisation existe
encore.
Elle appartient maintenant au Service de l'artillerie ; mais celui-ci
ne disposant pas des installations nécessaires pour les
conserver, a
demandé au Service des poudres de les stocker dans ses
établissements. Tous les
stocks existants ne
répondent pas aux conditions de recette exigées
actuellement des
produits neufs de même
nature.
Ces
stocks ne peuvent pas par
conséquent
être transformés immédiatement en
munitions de la réserve de guerre. Néanmoins
il y a lieu de les considérer comme constituant un
approvisionnement
"d'avance" susceptible après remaniement, d'être
utilisé pour les
besoins de la mobilisation.
Les stocks de poudres restant de la guerre, ont
été classés en 2
groupes comprenant d'une part les poudres susceptibles d'entrer dans
les approvisionnements, d'autre part, les poudres à
conserver sous l'eau
suivant le
système approuvé en 1919 par la commission
des armements de
la Chambre
des Députés et
par la Chambre elle même dans sa séance du 14
octobre 1919.
Les poudres du 1er groupe sont
stockées en magasins et
visités annuellement. Celles
du 2e
groupe sont provisoirement, pour une fraction,
immergées dans
les
ballastières de certaines poudreries, pour le reste conservées en
magasin, jusqu'à aménagement des lacs artificiels
actuellement
en cours de
réalisation en montagne.
A cet effet,
deux lacs
artificiels doivent être créés par
édification de 2 barrages, l'un
à
Charpal sur
la Colagne
(Lozère) à 1300 mètres d'altitude,
l'autre sur
la Romanche au lieu dit le Chambon (Isère) à 1000
mètres.
Le barrage,
construit dans des
conditions difficiles
et dangereuses, est
fragile. A sa mise en eau, de nombreuses fuites sont
constatées. Deux
brèches doivent
être pratiquées qui réduisent sa
capacité des deux tiers.
Le projet
d'enfouissement est
abandonné.
La construction a pris du temps pendant lequel les munitions ont
été
enterrées et "oubliées".
Ainsi quand il est acquis qu'aucun obus ne sera immergé, il
ne reste
plus qu'à démonter la voie ferrée. Ce
sera fait en 1938*.
* Selon Wikipédia qui ne cite
pas sa source. En
1942, une grande partie du domaine de
Charpal glisse du ministère de la Production
industrielle vers celui du ministère de l'agriculture et du
ravitaillement.
"Nous, Maréchal de France, chef de l'Etat
français,
Sur le rapport du ministre... Décrétons, Art.1er.
- Le domaine dit "de Charpal" constitué par le bassin de
retenu des
eaux de Charpal, ainsi que l'emprise de la voie ferrée
reliant le parc
de stockage des poudres à la ligne de Mende à
Labastide dans la partie
comprise entre Charpal et la route nationale N° 88 (Mende-le
Puy) au
lieudit "Pierre-Plantée", avec les bâtiments
construits sur cette
emprise, l'ensemble d'une contenance totale de 339 hectares, 10
centiares, précédemment affecté au secrétariat d'Etat
à la production
industrielle (direction
des industries chimiques) est affecté au
ministère de l'agriculture et
du ravitaillement (direction générale des eaux et
forêts). Art.
2. - Le ministre secrétaire d'Etat à l'agriculture et au
ravitaillement est
chargé de l'exécution du
présent décret, qui sera publié au
Journal officiel de l'Etat français
Fait à Vichy, le
11 juillet 1942.
Ph.
Pétain
Le ministre
secrétaire d'Etat à l'agriculture
et au
ravitaillement,
Jacques
Le Roy Ladurie."
Un panneau
implanté sur le site résume l'histoire du barrage.
Il comporte quelques inexactitudes dont une passe presque
inaperçue
mais a été reproduite sur internet :
"Il n'y avait donc plus assez d'eau pour assurer l'immersion et
parallèlement l'invention
de
la poudre pyroxylé beaucoup plus stable a rendu ce projet
caduc." Aucune
invention n'a pu
venir contrarier le projet d'enfouissement de poudres qui
n'étaient pas
destinées à resservir.
La ville de Mende,
propriétaire de l'ouvrage depuis 1946, remet le barrage en
état en 1992
et lui rend sa capacité initiale. Le lac sert alors
d'alimentation en
eau de la ville.